Le président de la CNIDH affirme que toutes les parties prenantes sont satisfaites des résultats des élections législatives et communales de 2025. Pourtant, plusieurs rapports nationaux et internationaux dénoncent de graves irrégularités qui contredisent cette version officielle.
Le Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme au Burundi, Fortuné Gaetan Zongo, estime que les élections législatives et communales de 2025 se sont tenues dans des conditions très éloignées des standards internationaux en matière d’élections libres, transparentes et équitables. À l’inverse, Mgr Martin Blaise Nyaboho, président de la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH), affirme que le processus électoral s’est bien déroulé et que tous les partis politiques sont satisfaits.
Mais les faits racontent une toute autre réalité.
Des élections entachées d’irrégularités selon l’ONU
Dans son rapport présenté le 19 septembre 2025 à Genève, lors de la 60ᵉ session du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, Fortuné Gaetan Zongo a dressé un constat sévère du processus électoral burundais.
Selon lui, les élections engagées depuis 2023 ont été marquées par « l’exclusion de figures majeures de l’opposition, des contributions forcées imposées à la population et un climat d’intimidation ». Le résultat : une victoire écrasante du parti au pouvoir avec près de 96 % des voix — un score qui illustre, selon Zongo, l’éloignement des standards internationaux en matière d’élections libres et équitables.
La CNIDH présente une version opposée
Le 23 septembre 2025, dans une interview accordée à BBC Gahuza, Mgr Martin Blaise Nyaboho a tenu un discours radicalement différent.
« Les élections se sont bien déroulées, car elles ont vu la participation de plus de 30 partis politiques. Est-ce qu’on peut dire qu’elles se sont mal passées parce qu’une seule personne n’a pas participé ? »
« Amatora yagenze neza kuko yitabwe n’imigambwe irenga mirongo itatu. None habaye umuntu umwe atayagiyemwo, bica vyitwa ko yagenze nabi ? »
Il a ajouté que « les élections se sont bien déroulées et les acteurs sont satisfaits des résultats issus des urnes », tout en reconnaissant « quelques irrégularités mineures » qui, selon lui, ne remettent pas en cause le bon déroulement du scrutin.
De nombreuses voix contestataires
Contrairement aux affirmations du président de la CNIDH, plusieurs partis politiques, organisations de la société civile et l’Église catholique ont dénoncé des irrégularités majeures, et ce, dès la tenue du double scrutin du 5 juin 2025 :
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Le 9 juin 2025, le parti CNL a dénoncé de nombreuses irrégularités sur tout le territoire, estimant que les résultats issus d’un tel processus ne pouvaient être cautionnés.
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Le 10 juin 2025, les Évêques catholiques ont souligné dans un communiqué que « le chemin vers l’organisation d’élections libres et transparentes est encore long », appelant à repenser le cadre légal et les pratiques électorales.
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Le 11 juin 2025, le parti UPRONA a qualifié les élections de « rendez-vous manqué », accusant la CENI et ses démembrements d’avoir failli à leur devoir de neutralité et rejetant en bloc les résultats qu’il a qualifiés de « mascarade électorale ».
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Le même jour, la Coalition Burundi Bwa Bose a également rejeté les résultats, dénonçant « des élections manipulées qui ne reflètent aucunement la volonté exprimée dans les urnes par les Burundais ».
Conclusion
Les déclarations de Mgr Martin Blaise Nyaboho, selon lesquelles « tous les acteurs sont satisfaits », sont fausses. Les élections législatives et communales du 5 juin 2025 n’ont ni été libres, ni inclusives, ni transparentes. Les rapports de plusieurs partis politiques, d’organisations nationales et internationales de la société civile ainsi que des autorités religieuses pointent tous dans la même direction : une CENI dominée par le CNDD-FDD, un appareil sécuritaire et administratif aux ordres, et un processus électoral largement biaisé.
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Photo : Mgr Martin Blaise Nyaboho qui affirme que les élections se sont bien déroulées, invoquant la participation de plus de 30 partis politiques.