Depuis le lancement officiel de la campagne électorale du 12 mai 2025, des enfants ont été vus dans des rassemblements du CNDD-FDD, vêtus aux couleurs du parti, chantant ou dansant. Ces scènes, relayées par des vidéos et des témoignages concordants, ont suscité de nombreuses réactions. Si les autorités parlent de patriotisme, les défenseurs des droits de l’enfant dénoncent des dérives.
Depuis l’ouverture de la campagne électorale pour les législatives et les conseils communaux, plusieurs sources fiables ont signalé la participation de jeunes enfants aux activités organisées par le parti au pouvoir, le CNDD-FDD.
Des enfants âgés de 7 à 12 ans ont été filmés à Kayanza le 27 mai 2025, entonnant l’hymne du parti. Une autre scène, à Gitega, montre le président Évariste Ndayishimiye dansant avec un enfant vêtu de la tenue officielle du parti. Des images largement partagées sur les réseaux sociaux confirment ces faits.
Ce qu’en disent les acteurs
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Le CNDD-FDD assume pleinement sa volonté d’impliquer les enfants dans la vie idéologique du parti. Lors d’une conférence publique à Makamba le 9 janvier 2025, son secrétaire général a déclaré que le parti souhaite éduquer les enfants au patriotisme dès le plus jeune âge, les qualifiant d’« ibiswi vy’Inkona » (« aiglons »), appelés à grandir avec les valeurs du parti.
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Des enseignants, notamment à Isare, rapportent que certaines activités de campagne ont perturbé les cours, citant notamment des élèves mobilisées pour des danses politiques, entraînant même la suspension d’épreuves scolaires.
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La FENADEB (Fédération des Associations Engagées dans le domaine de l’Enfance) condamne fermement cette pratique. Elle alerte sur les risques pour le droit à l’éducation, la scolarité perturbée et l’exposition précoce à des enjeux politiques non adaptés à l’âge des enfants.
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Le ministre de l’Intérieur, Martin Niteretse, a réagi en niant tout caractère obligatoire dans la participation des enfants. Il a toutefois reconnu leur présence et a rappelé que leur implication dans des activités politiques est interdite pendant les heures de classe.
Que disent les normes internationales ?
La Convention internationale relative aux droits de l’enfant (CIDE), adoptée par l’ONU en 1989 et ratifiée par le Burundi, définit un enfant comme toute personne de moins de 18 ans.
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Elle ne proscrit pas explicitement la participation des enfants à des activités politiques, mais insiste sur le respect de leur développement physique, mental, moral et social.
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L’article 32 exige la protection contre toute forme d’exploitation, y compris lorsqu’une activité politique devient une charge inappropriée ou une source de pression sociale.
Analyse
La participation visible d’enfants aux campagnes du CNDD-FDD est établie par des preuves visuelles et des témoignages concordants. Elle s’inscrit dans une volonté politique assumée de transmettre précocement les valeurs du parti.
Cependant, cette implication de mineurs dans des activités politiques soulève plusieurs questions juridiques, éthiques et éducatives. Les perturbations des cours et les pressions ressenties dans certaines écoles ne peuvent être ignorées.
Même si aucune preuve de coercition systématique n’a été établie à ce stade, le simple fait que des enfants soient intégrés dans des campagnes électorales, parfois pendant les heures de classe, entre en conflit avec les principes de protection de l’enfance garantis par les textes internationaux et burundais.
Conclusion
Il est établi que des enfants participent activement aux campagnes électorales du CNDD-FDD, souvent vêtus aux couleurs du parti et visibles lors de rassemblements officiels.
Bien que les autorités affirment qu’il n’y a pas de contrainte, cette participation, parfois durant les heures scolaires, interroge sur le respect des droits fondamentaux des enfants, en particulier leur droit à une éducation sans interférence politique.
La situation actuelle reflète une ligne idéologique assumée par le parti au pouvoir, mais elle reste controversée au regard des principes de protection de l’enfant.